25 avril 2012

COUPS DE CŒUR (HORS SERIE 28) : "Autant la mer" de François Matton

Découvert par hasard ce très bel album-livre comme je les aime, où l'histoire mêle les mots et le dessin. Un trait acéré et plein de poésie, sans fioritures ni concessions. c'est moderne et très classique en même temps. L'histoire est belle et parlera certainement à beaucoup. Une parenté indirecte avec Venise qui parlera aux lecteurs de TraMeZziniMag. Voici ce que l'auteur a écrit sur cet opus dans son blog :
"Vouloir partir vivre sur l'eau est un rêve d'enfant qui ne s'encombre pas du réel. C'était le rêve de mon frère Benoît, tel que je le raconte dans Autant la mer. Partir vivre sur l'eau, loin de l'agitation des villes, loin des habitudes bourgeoises, loin de ce qui se répète sans qu'on le remette en question, loin des moules dans lesquels, après quelques fanfaronnades, on se coule si vite (c'est tellement pratique), loin des responsabilités compliquées, loin des enjeux d'argent, loin de la nécessité de se battre pour travailler, loin de la nécessité de jouer des coudes pour être, sinon le premier, celui qui sait passer sans scrupules au-dessus des autres (tous les coups bas sont bons), loin des stratégies honteuses nécessaires pour se faire passer pour celui sur qui compter, loin de tout les arrangements véreux - sans parler de la vie de couple, de la sexualité arrangée, cadrée, fichée, tristement réglée. Partir loin de tout ça qu'il est répugnant d'endosser à son tour : le monde bavard des hommes qui produisent, réclament, vendent, mentent, se réjouissent de réussir un coup, se désolent outre mesure d'en avoir raté un autre. Cette misère que mon frère, encore très jeune, n'avait pas connue directement mais qu'il devinait facilement par l'observation des autres (The Others), il voulait la fuir au plus vite, et je le comprends." 
 Autant la mer 
François Matton 
Éditions P.O.L. - 2009 
128 pages, 17 €

Evviva San Marco !

 
C'est aujourd'hui le 25 avril, journée sacrée entre toutes pour les vénitiens : la fête de Saint-Marc. Symbole de la Sérénissime République, resté très cher au cœur des habitants, cette solennité se traduisait avant 1797 par une grande procession dont le doge prenait la tête et qui rassemblait toute la population, du plus humble au plus noble.
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C'est aussi le jour où les hommes offrent à leur belle, leur fille, leur mère, un bouton de rose rouge, le bòcolo. Tramezzinimag a publié à plusieurs reprises la légende qui entoure cette sympathique tradition. Les opinions divergent sur l'origine de cette coutume, toutes sont poétiques et romancées. Le 25 avril correspond aussi, hasard de l'histoire, à la fête nationale de l'Italie qui fête en ce jour sa libération du joug fasciste en 1945.

Buona Festa di San Marco a tutti ! 

 

Chronique nocturne d'un 25 avril à Venise

Ce matin, sous le premier véritable soleil de printemps, alors que défilaient sur la Piazza, les mêmes drapeaux partisans que soixante-sept ans plus tôt, comme partout ailleurs dans nos belles villes, avec une charge d'espoir sans égal dans toute l'histoire de l'Italie, me sont revenus à l'esprit ces beaux vers de Rimbaud, écrits juste après la Commune, qui plus que jamais dans la période d'incertitude dans laquelle nous vivons, résonnent dans la tête de tous ceux qui défilaient, joyeux mais préoccupés. N'expriment-ils pas, outre le plaisir et l'enthousiasme d'être là, l'espoir que bientôt enfin « nous entrerons aux splendides viles » pour renouveler le Pacte des beaux espoirs des jours de la Libération. Contrairement à l'époque, notre patience est moins ardente ; beaucoup fatiguent à résister à tout ce qui éloigne notre société des acquis de la Résistance. Rester fidèle, ici en Italie comme en France et ailleurs en Europe, aux idées généreuses de liberté et d'égalité, de paix et d'entraide. L'esprit dont nous sommes tous si fiers du 25 avril. Une résistance non moins décisive que celle qui a ouvert les portes de la dignité, de la liberté et de la démocratie il y a soixante-sept ans !