19 juin 2008

Le concert d'Enrico Gatti : joie, joie, pleurs de joie...

Au risque de paraître trop sensible aux yeux de mes lecteurs en paraphrasant ce cher Blaise Pascal, je voudrais vous parler de la larme (presque) versée hier soir, à la fin du merveilleux concert donné par Enrico Gatti, Guillaume Rebinguet-Sudre et Aurélien Delage. Une larme, une vraie. Pas de tristesse ou de regret. Une larme de joie. "Que du bonheur" comme on dit trivialement. Cela vous fait déjà sourire. Pourtant je ne suis pas accoutumé à des débauches de sentimentalisme à la guimauve. Ce qui a motivé cette larme, je vais vous l'expliquer. 

La journée avait été longue, pénible. Il avait fallu courir pour éditer à temps les programmes, s'occuper des enfants, satisfaire quelques clients impatients, passer à la banque, aller à deux rendez-vous ennuyeux, ranger un peu, se laver, se changer et arriver sans trop avoir l'air défait sur le parvis de l'abbatiale Sainte-Croix. Ce n'était pas la foule des grands jours, mais peu à peu l'église se remplissait. L'abbatiale est une vaste nef en piteux état dont les parois sont couvertes de magnifiques tableaux dont certains datent du XVIe et du XVIIe siècles. Il y règne une atmosphère très forte qui attire le recueillement et la prière. C'est là qu'on peut admirer le magnifique orgue de Dom Bedos avec son somptueux buffet vert et or. 
Le concert s'ouvrait sur une première partie réservée à la musique italienne. Un peu toujours la même chose, avec quelques variantes de génie. Un voyage de Venise à Naples, en passant par Rome. Puis, après l'entracte, place fut faite à la musique française avec Leclair. Aurélien ensuite interpréta des extraits du de Clérambault au grand orgue, puis vint le de J.S. Bach magistralement interprétés par ces trois musiciens. Une foule heureuse, bon enfant, qui acclama le maestro et ses deux acolytes. Puis Enrico Gatti annonça le premier bis. Ce fut le premier mouvement de la première sonate de l'Opera Prima d'Antonio Vivaldi ! Comme sur le disque édité chez Glossa dont j'ai déjà parlé dans ces colonnes (cliquez sur le lien). Même son, même force, même limpidité. Guillaume Rebinguet était parfaitement à sa place aux côtés de celui qui fut son professeur et Aurélien participait de cette harmonie au continuo. Deuxième bis, le deuxième mouvement de la sonate... J'aurai aimé que la musique ne s'arrête jamais. Et c'est là que toute cette émotion embuât mon regard. Bonheur parfait. Après la rude journée, la récompense d'un grand moment de musique avec l'un des plus grands musiciens baroques d'aujourd'hui...