09 avril 2012

Repas dominical, repas pascal

Notre repas de famille est un moment important, surtout depuis 2005, Annus Horribilis qui vit l'éclatement de la famille, le départ de la "grande maison dans les arbres" comme nous l'appelions, et mille autres catastrophes domestiques très lourdes à vivre. Heureusement la Providence dès les débuts de ce cataclysme nous a toujours réservé de belles éclaircies : la découverte de Venise par Constance, alors seulement âgée de 9 ans, l'arrivée inopinée dans nos vies de Mitsou le roi des chats, et mille petits riens qui nous ont aidé à poursuivre ce chemin. Ne serait l'absence de ma fille aînée, partie dans les neiges du Québec, nos repas dominicaux (une fois par mois seulement hélas), ces moments privilégiés, sont toujours une pause, paisible et joyeuse à la fois. J'essaie à chaque fois de faire en sorte que le repas soit bon et original, que la table soit belle. Lors de notre dernière rencontre au sommet, pour Pâques, l'agneau bien évidemment était à l'honneur.

Polpette de Pâques
Pour changer du gigot pascal, j'ai réalisé cette année un plat de polpette maison, mélange d'agneau et de bœuf haché à la turque, traditions familiales obligent. Servi avec de la polenta en purée (cuite non pas à l'eau pure, mais dans un fonds de champignon) et des petits légumes en fondue, ce fut un vrai régal. La recette est en dessous.

Ingrédients : 800 g d'agneau de lait, 800 g de bœuf, 2 œufs, trois ou quatre petits poireaux nouveaux, deux grosses carottes, deux courgettes, 500 g de champignons frais, 1 gousse d'ail, 1 petit oignon, du cumin, de la coriandre fraîche, du persil, de la menthe fraîche, une pincée de piment de Cayenne, sel et poivre, Worcester sauce, chapelure, huile d'olive.

Dans un fonds de viande, faire cuire des champignons de Paris tranchés, avec ail, sel et poivre. Quand les champignons sont cuits les égoutter et les mettre de côté. Faire chauffer du beurre dans une sauteuse avec une cuillère à soupe d'huile d'olive. Y mettre les légumes coupés en petits morceaux (j'ai utilisé des courgettes, des carottes, des poireaux, puis les champignons). Laisser fondre et caraméliser sans brûler. Ajouter du bouillon pour éviter que le mélange n'accroche. Quand les légumes sont cuits, saler et poivrer modérément. Ajouter un hachis d'ail, coriandre et persil. Laisser au chaud.

Mélanger la viande, l'oignon, l'ail et les herbes finement hachées dans un saladier, ajouter les œufs un à un, la chapelure, mettre quelques gouttes de Worcester sauce, assaisonner. Quand le mélange est terminé, faire de petites boulettes rondes à l'aide d'une cuillère et les déposer sur un plat huilé. Mettre à cuire à four moyen pendant une vingtaine de minutes (ou plus selon les préférences pour la viande rosée ou très cuite).

Pendant la cuisson de la viande, préparer la purée de polenta en mettant 1/3 de lait pour 2/3 du bouillon de viande dans lequel on a cuit les champignons et une gousse d'ail. Quand la polenta se détache des parois de la casserole, ajouter de l'huile d'olive et une noix de beurre. remuer pour éviter que la purée de se dessèche.

Dresser la purée dans un plat, disposer tout autour les polpette et les légumes mélangés. napper du jus de viande déglacé avec un peu de vin blanc et une ou deux cuillerées à soupe de yaourt turc (sans gélatine) ou de crème fraîche. Vérifiez l'assaisonnement et servir aussitôt.

07 avril 2012

Pietro della Vecchia, un petit maître injustement méconnu

Pietro della Vecchia, de son vrai nom Pietro Muttoni qui naquit et mourut à Venise (1603 - 1678), est un peintre aujourd'hui considéré comme mineur mais qui, principalement actif dans sa ville natale en pleine époque baroque, représentant bien cette grande école vénitienne. Élève d'Alessandro Varotari dit il Padovanino qui lui apprit la manière des grands précurseurs du XVIe siècle, notamment Titien et Giorgione. Reconnu pour l'habilité avec laquelle il reproduisit le style des maîtres du XVIe siècle, il fut aussi le spécialiste des scènes grotesques et un portraitiste réputé. Peintre officiel de la République, il fut chargé de la réalisation des cartons des mosaïques de la Basilique Saint-Marc, vaste chantier qui l'occupa tout entier de 1640 à 1673. Il épousa une femme peintre d'origine flamande, Clorinda Renieri, fille du peintre Nicolas Regnier, surtout passé à la postérité en tant que marchand d'art, avec lequel Pietro Della Vecchia entretenait des rapports d'affaires. Il repose dans l'église San Canciano où eurent lieu en septembre 1678 des funérailles d’État conduites par les plus éminents membres du Sénat.

06 avril 2012

Au hasard de nos promenades...

Connaissez-vous le Palazzo Montecuccoli ? Construite au XVème siècle dans le style de Pietro Lombardo, cette vaste bâtisse se trouve au sud du Grand Canal, non loin du pont de l'Accademia, pratiquement en face du Palazzo Franchetti. 
 
Plus connue sous le nom de Ca' Contarini dal Zaffo, l'imposante demeure est couramment appelée aujourd'hui Palazzo Polignac. Ce fut la résidence de Winnerita, Princesse de Polignac, la fille de l'homme d'affaire américain Isaac Merritt Singer, fondateur de la célèbre entreprise de machines à coudre. Sa sœur qui avait épousé le Duc Jean-Elie Decazes s'étant suicidée, elle élèvera ses neveux et leur lèguera le palais. C'est sous le 5e duc, Elie, disparu l'année dernière, arrière-petit-neveu de la Princesse de Polignac, que j'ai eu le bonheur de fréquenter cette maison tellement hospitalière qui grouillait d'amis inconnus et de visiteurs illustres. Dans l'un des premiers billets de ce blog, un lecteur anonyme m'en avait fait le reproche assez crûment alors - je racontais ces rencontres incroyables pour le jeune homme que j'étais : le vieux prince de Faucigny-Lucinge sourd comme un pot quand cela l'arrangeait qui nous racontait sa jeunesse et se moquait de son neveu par adoption, l'ancien président Giscard ("celui au nom d'emprunt" comme avait dit avec malice le Général de Gaulle), le chef lyonnais Paul Bocuse... C'est dans ces murs aussi que j'appris à mieux connaître mon ami Roger de Montebello, petits-fils du duc, ses cousines Sabran, les Breteuil... Une famille très unie, drôle qui vivait simplement et s'amusait beaucoup. La duchesse Solange servait le soir après dîner du tilleul venant de leur propriété de Libourne, les dîners étaient souvent monochromes, concocté par un chef emprunté à quelque ambassade, le service impeccable et un protocole royal qui effrayait un peu - c'était voulu - le jeune homme mal dégrossi que j'étais. Combien d'après-midi passés dans le jardin à papoter... Et cette fameuse visite de la reine mère d'Angleterre venue inaugurer des vitraux restaurés de San Giovanni e Paolo qui passa prendre le thé au palais.
 
Walter Richard Sickert, l'artiste qui a peint cette toile (entre 1901- 1904) et qui avait rencontré la princesse à Dieppe fut convié quelques temps après à Venise. Il y réalisa de nombreux dessins et on connait de sa période vénitienne plusieurs belles vues du palais Polignac. Certains de ses dessins sont aujourd'hui dans des collections publiques, comme une très belle ébauche de ce tableau au crayon et à l'encre rouge, conservée à la Whitworth Art Gallery de Manchester.

Vendredi Saint

La pluie et le ciel bas ce matin illustrent ce jour terrible où les chrétiens pleurent la mort du Christ sur la croix. Dans les rues désertes, les pavés luisent et quelques oiseaux s'essayent transperçant par la joie de leur chant la pesanteur du jour. Temps orageux. Lumière violente. 
 
Le double chœur qui débute la Passion selon Saint Matthieu de Johann Sebastian Bach adoucit ces moments que nul croyant ne peut affronter sans ce mélange de terreur, de chagrin et d'espoir. Office des Ténèbres à l'aube chez les dominicains. Beauté des psaumes et du rite millénaire. Les quinze cierges qui brillent dans l'église sombre, l'église vidée de la présence de Celui qu'elle vénère. Gravité des voix qui montent et se répandent. Elles sont au-delà de la plainte ou de la louange. Le visage caché par leurs capuchons noirs, les moines sembleraient de pierre s'ils ne relevaient parfois la tête pour faire éclater leurs voix. Harmonie parfaite. Une expérience esthétique et mystique incomparable.

La certitude qu'avec l'assistance les anges et l'âme des morts sont présents et chantent aussi. Il faut avoir assisté à ce rite très ancien pour comprendre combien les esprits les plus rétifs sont saisis, combien on est très vite placé face à une inextinguible vérité qui nous dépasse et, loin de nous écraser, nous soulève et nous grandit. En découle une envie de louange et une grande joie. Une grande paix aussi. Que ce soit à San Giovanni e Paolo, chez les bénédictins de San Giorgio où sur l'île de Saint François, au couvent des Arméniens ou bien chez les jésuites, le Triduum pascal est un temps très fort, immuable et profond, passerelle entre notre monde imparfait et la perfection de l'amour divin. La plus importante fête de la liturgie chrétienne est commencée. Elle débute par l'horreur d'un abandon, la douleur d'une mort pour s'enflammer dans l'incroyable joie de la Résurrection. Combien de peintres, de sculpteurs, de musiciens et de poètes ont fait de chefs-d’œuvres sur la Pâque chrétienne !
 
Et pourtant, à Venise comme ailleurs, le temps de Pâques qui succède au temps du Carême, le temps le plus important du calendrier liturgique chrétien, comme Pessa'h l'est pour les juifs, passe inaperçu désormais dans notre monde déspiritualisé. Et cela n'a rien à voir avec la laïcité, principe fondamental de liberté et de droit. La vie continue, les touristes arpentent avec autant d'avidité les parcours balisés par les guides au pas de course, les gens vont et viennent dans les magasins, vaquent à leurs occupations. beaucoup se rendront exceptionnellement à la messe du jour de Pâques voire même à la veillée pascale.
 
 
La plupart savent qu'il s'agit de commémorer la mort et la résurrection du Christ. On mange de l'agneau et on cache des poules en chocolat dans le jardin pour les enfants... Mais combien sauront se recueillir un moment en famille et penseront à cet évènement extraordinaire constitutif de ce que nous sommes, de notre civilisation, de notre lien à l'autre, de nos engagements, de notre relation à l'autre ?
"Il était déjà environ la sixième heure, et il y eut des ténèbres sur toute la terre, jusqu'à la neuvième heure. Le soleil s'obscurcit, et le voile du temple se déchira par le milieu."

03 avril 2012

COUPS DE CŒUR (HORS SERIE 25) : La Venise de Francesco da Mosto 1ère partie (1-6)

Réalisé pour la BBC, le somptueux documentaire du NH Francesco da Mosto, architecte et Fou de Venise où ses ancêtres sont présents depuis plus de mille ans, n'existe à ma connaissance qu'en version anglaise. Ce film a ses détracteurs et on peut trouver le fringant Da Mosto un peu trop hollywoodien (ou Las Vegan plutôt), mais il a le mérite de présenter avec des phrases claires et de belles images une histoire de la Sérénissime dramatisée et très réaliste.
















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6 commentaires:

AnnaLivia a dit…
J'avais regardé ces émissions il y a quelques années, bien intéressant et quel personnage : ) Bonne journée Lorenzo!
Lorenzo a dit…
Bonne journée à Québec !
Veneziamia a dit…
Dans la série reportage, en voici un très intéressant qui passe actuellement sur tv5.ca et que l'on peut voir sur ce lien : http://video.tv5.ca/ports-d-attache-2/venise Bonne journée Lorenzo !
Coyote a dit…
Dommage qu’il cause en langue roastbeef ce vénitien…. Je n’ai hélas pas saisi le quart de son discours, j'ai du me consoler avec l’image….
Lorenzo a dit…
on va demander à la BBC une version française ou des sous-titres sinon on va s'y atteler.Promis.
dominique a dit…
unusual ... merci

01 avril 2012

COUPS DE CŒUR (HORS SERIE 24) : Il se nomme Claudio Boaretto


Il est né à Venise et ne parle que le français et... le dialecte. Sa vie, depuis son retour sur les lieux de son enfance, est celle de tous les vénitiens : la barca, la pêche, les copains, les baccari. Il a passé l'essentiel de sa vie en France. Auteur-compositeur et interprète, il s'est exprimé en chantant sa vie durant, dans la lignée des Georges Brassens, Hugues Aufray, Léo Ferré et Jean Ferrat, se taillant une bonne et solide réputation dans le milieu folk francophone. Le peu que je sais de lui me fait affirmer que c'est un vrai poète. Un troubadour. Je vous recommande son blog, écrit depuis Castello qui permet aux lecteurs une plongée directe dans la vie vénitienne. Sa musique sonne vraie et j'imagine une soirée au Paradiso Perduto ou dans un bacaro plus secret, entre amis avec Claudio Boaretto et sa guitare. On prend date ?


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3 commentaires:

Virginie Lou-Nony a dit…
Oui, moi je veux bien prendre date! (en juillet, svp…)
Coyote a dit…
C’est trop d’honneur, Monseigneur…. Merci Lorenzo pour cette élogieuse présentation, les poils de ma barbe en rougissent de confusion…. Petite précision malgré tout : contrairement à mon frère ainé, Renato Boaretto, maitre d’art, créateur d’automates reconnu, notamment et évidemment des personnages de la Commedia dell’Arte, je ne suis hélas pas né à Venise…. Mes parents ont quitté la Sérénissime pour émigrer en France deux mois à peine avant ma naissance…. Il s’en est fallu de peu…. Conçu à Venise, j’ai donc commencé très jeune à voyager pour voir le jour sur les plages Normandes ; Arromanches, Asnelles ont bercé ma prime jeunesse…. Venise, c’était pendant les grandes vacances avec la nona Gemma e el nono Giovanni…. Mia Mama ne parlant que le vénitien, (elle trouvait l’italien trop snob) ce fut ma langue maternelle, j’appris plus tard le français à l’école…. Merci encore Lorenzo pour « le vrai poète » mais c’est un qualificatif lourd à porter pour mon modeste talent…. Je préfère me présenter plus naturellement comme un « artisan parolier » et revendique plus facilement le titre « d’artiste »…. Pour mes chansonnettes, c’est quand vous voudrez, mais devant un auditoire francophone car la richesse de la rime française ne touche pas encore le public italien….
Anonyme a dit…
OK Claudio, on attend le jour J. 
Venessiamente 
Gabriella

27 mars 2012

La Galerie de Tramezzinimag : Enzo Pedrocco et le quotidien, ce qu'on préfère à Venise...

Pour bon nombre des lecteurs de TraMeZziniMag, c'est d'abord la vie quotidienne qui plait avec son charme, ce rythme unique qu'on ne retrouve dans aucune autre ville du monde. D'autres mettront en avant la musique, les restaurants, les baccari, les reflets qui démultiplient à loisir tout ce que notre regard peut capter de beauté, il y en a qui ne jurent que par les églises ou les palais, Philippe Sollers choisirait les filles, lui qui prétend que Venise est avant tout la ville des femmes quand Rome serait celle des gitons. Certains ne feront pas le détail et englobent tout dans leur amour-passion. Mais n'est-ce pas le vénitien qui est le mieux placé pour décrire ce qui peut provoquer ce délire intérieur quand il s'agit d'évoquer la Sérénissime ? 

Le fringant Enzo Pedrocco de Venessia.com est un vénitien de San Girolamo. Depuis des années, il voit sa ville qui change et pousse de temps à autre de grands coups de gueule salutaires. Ses photos sont régulièrement publiées dans le Gazzettino et bon nombre de sites vénetophiles connaissent ses clichés. Témoin attendri du quotidien, il sait montrer avec humour, parfois avec un brin de mélancolie la Venise d'aujourd'hui. Pedrocco est un bon vénitien. Un vrai de vrai. Un de ceux à qui on aimerait pouvoir ressembler. 

S'il aime à voyager, il revient toujours dans sa ville avec bonheur et son objectif immortalise ces mille sensations ordinaires qui font le doux poison de Venise. Le seul en tout cas qui ne tue pas, mais régénère tout en nous. Ce n'est pas pour rien que le lion de Saint-Marc a des ailes, il matérialise avec splendeur la transformation que Venise opère en nous : il nous pousse des ailes ! C'est un florilège de ses clichés que je vous propose aujourd'hui. 


1 - Un chat à sa fenêtre

2 - la vieille dame

3 - Juifs vénitiens pendant Hag haSoukkot, la fête des tentes

4 - Passeggiata automnale à San Barnaba

5 - San Girolamo au bout de la Fondamenta delle Capucine. les lecteurs s'en fichent certainement, mais j'ai vécu un an un peu plus loin sur la droite, mes fenêtres donnant sur le terrain de sport...

 
6 - Vie tranquille à San Alvise

7 - Jeu de garçons et ses inconvénients. On a tous eu ce petit problème...

8 - Méditation post-méridienne

9 - Sérénité.

10 - Chiachierata

11 - Les joueurs de carte et le caniche. Me rappelle une belle estampe de Mario Rocchi.

12 - Poésie de l'ordinaire.

13 - Cortile secret.

14 - Douce paix du jour.

15 - Petits riens du quotidien. On est loin des touristes et c'est bien.

16 - Venise aussi a sa Movida et c'est chaque soir ! Si seulement nous avions eu cette chance à l'époque de mes vingt ans. Seul le Cherubin à San Luca, et le Haig's près du Gritti restaient ouverts tard le soir. A 22 heures, niente "movida" ! Santa Margherita et la Misericordia n'étaient que désert...

26 mars 2012

Dans les matins de Venise

Toutes les saisons sont belles à Venise. Même les jours de grisaille, quand le ciel est si bas qu'on le confond avec les eaux sombres de la lagune endormie, il y a toujours l'éclat d'un reflet ; l'argent et l'or des coupoles qui surgissent dans l'enchevêtrement des toitures de briques. Mais c'est au début du printemps que la ville est un régal pour les yeux. Peut-être parce qu'on avait oubli cette douceur qui se répand dans l'air et transforme tout ce que nous voyons en bonheur. Il fait plus chaud que d'habitude cette année et l'air s'est soudain rempli de senteurs estivales. "Venise est un bonheur" ne cessent de scander les billets de ce blog. Rien d'exagéré dans ces propos, ceux qui aiment et connaissent Venise le savent bien.
 
Pour les autres, ceux qui n'ont pas encore eu la chance de pénétrer ce mystère, je vous invite à fermer les yeux et à écouter, là où vous êtes, les bruits de la ville, le chant des oiseaux, le clapotis de l'eau... Au loin, une cloche, les bruits d'un chantier, le choc des coups de marteau sur le métal, un groupe d'enfants joyeux qui passe avec leur maître, des dames qui bavardent en allant au marché, plus loin encore des pas sur les dalles, un chien qui aboie... 
 
Évacuez le bruit des automobiles et laissez votre esprit s'imprégner de tous ces sons que transporte la lumière d'un matin de printemps, cette lumière diaphane qui se répand partout comme une chanson joyeuse, enrobe les bourgeons dans les arbres et les cheveux des filles d'un halo mordoré... Vous y êtes ? Hé bien ce que vous ressentez en cet instant c'est ce qu'on ressent quand par un jour de printemps comme celui-ci, on se promène dans les matins de Venise.
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Photo © Enzo Pedrocco - Tous Droits Réservés.

24 mars 2012

Evviva la primavera !

 
Le 20 mars est un jour particulier pour moi. C'est le jour où ma mère est morte, après une longue et terrible maladie. Nous étions en 1993 et mon fils Jean allait naître. C'était un samedi, le premier jour du printemps. La symbolique ne m'a jamais échappé... La mort, la vie, le renouveau... Ne vous y trompez-pas, ce n'est pas un jour triste. Et puis ceux que nous aimons continuent de vivre tant que leur souvenir habite en nos cœurs.

Il avait fait merveilleusement beau toute la semaine et bien qu'épuisée, la vieille dame avait pu sentir les mimosas en fleur et se promener une dernière fois sous un ciel délicieusement clément. Nous avions évoqué, je m'en souviens, les délices de Venise au printemps, la glycine du Caffé del Paradiso derrière les Giardini, ou les grands arbres du vieux cimetière juif du Lido où personne n'allait jamais et où nous évoquions Lord Byron. Elle aimait particulièrement ces promenades au Lido.
 
Elle n'était venue à Venise que quatre fois. La première dans les années 70, étape d'un long périple familial en voiture qui nous mena en Turquie. Les autres fois quand j'y vivais. Elle ne connaissait de l'Italie que Florence où j'ai failli voir le jour, à quelques heures près, la baie de Naples et la Sicile. Venise lui convenait parfaitement, sa beauté, son charme mais aussi sa sérénité, son rythme. Avec mon frère, nous avions même envisagé qu'elle s'installe sur la lagune plusieurs mois par an. Cela n'a pu se faire. Elle est tombée malade. Une de ces terribles maladies dont on sait qu'il n'y a d'issue que fatale. J'aime à croire qu'elle aurait été très heureuse de vivre près de moi, à Venise avec son bon vieux gros chat Jules.
 
C'est justement au Lido que cette photo a été prise. elle est extraite d'un blog que je viens de découvrir, celui de Claudio Boaretto. En fait, nous nous sommes mutuellement découverts. La magie d'internet et les charmes de Venise. Mais je vous en reparlerai.